La série 5 est l’un des grands classiques de la gamme BMW. Elle reste l’exemple type de la grande routière établie, forte d’une image en béton, qui se consomme de préférence en 6 cylindres essence depuis des générations. Bonne nouvelle, n’en déplaise aux casseurs de rêves et briseurs d’excellence, c’est toujours possible. L’étonnante hybride plug-in 545e apparue à l’occasion du restylage de la Série 5 parvient à concilier prestations mécaniques de haute volée et sobriété bon teint.
L’espèce est malmenée mais fait mieux que résister. L’engouement pour les SUV a pourtant largement porté atteinte aux berlines conventionnelles, depuis plusieurs années déjà. Il n’empêche, les trois éternelles star du premium allemand attirent toujours un public fidèle, et l’obsession actuelle de chasse au C02 devrait logiquement favoriser leur retour en grâce. Qu’on le veuille ou non, un break ou une berline tricorps classique afficheront toujours une meilleure efficience qu’un profil haut perché et plus lourd. La Série 5 et ses rivales Audi A6 et Mercedes Classe E ne sont donc pas mortes, d’autant que l’hybridation a fait son chemin et permet de limiter la casse au niveau fiscal tout en préservant un agrément intact.
Concernant la BMW Série 5, quasiment toutes les motorisations reçoivent désormais une dose d’électricité (à différents degrés, hybridation légère 48V ou PHEV). En essence, les hybrides plug-in sont d’ailleurs devenus majoritaires sous son capot, à l’occasion du discret restylage intervenu mi-2020 (hormis la calandre et les optiques, rien ne bouge) : 520e, 530e et 545e, fortes de respectivement 204, 292 et 394 ch. Cette dernière attire l’attention, forcément, puisqu’elle est la seule à recevoir un 6 cylindres. Un bon vieux 6 en ligne essence, l’architecture traditionnelle BMW par excellence… Cette configuration n’est pas nouvelle en soi, les X5 et Série 7 la proposent déjà depuis quelques années.
Il y a 20 ans, une M5 ne faisait pas mieux
On retrouve donc l’archi-connu bloc de 3 litres suralimenté, un peu moins puissant qu’à bord de la 540i (qui disparait du catalogue français au passage). Le 6 cylindres développe ici 286 ch, et comme pour les plus modestes 520e et 530e, il est associé à un moteur électrique de 109 ch, accouplé à la boite ZF 8 rapports et alimenté par une batterie de 12 kWh. Celle-ci prend place sous la banquette arrière, reculant le réservoir (réduit à 46 l seulement) sous le plancher du coffre… qui perd 120 l de volume et chute ainsi à 410 l. Reproche hélas fréquent pour les PHEV, l’hybridation est rarement sans effet sur certains aspects pratiques. Et n’espérez pas compenser la perte de soute en optant pour le break, la 545e n’est disponible qu’en berline. En Touring, il faudra se contenter du 4 cylindres de la 530e.
Heureusement, la greffe est prometteuse au regard des chiffres délivrés par l’imposante machinerie. 394 ch en puissance combinée ? A peu de choses près, une M5 E39 ne faisait pas mieux avec son gros V8 atmosphérique de 5 litres (400 ch). Y compris côté chrono, malgré 300 kg de plus à emmener pour la 545e (2.020 kg !) : le 0 à 100 km/h est ici donné pour 4,6 s, contre 5,2 s pour la M5 voilà vingt ans.
Les préoccupations ne sont plus tout à fait les mêmes, évidemment. Aujourd’hui, une Série 5 est capable de mettre en veille son moteur thermique toute seule, en fonction du lieu où elle se trouve ! A l’approche d’une ZFE (zone à faibles émissions, 5 agglomérations sont classées ainsi en France à ce jour), l’auto peut en effet décider de couper d’autorité le 6 cylindres et de basculer automatiquement en 100 % électrique si le niveau de charge de batterie le permet. Drôle d’époque, mais si il faut passer par là pour faire perdurer les moteurs de cette trempe, après tout… Au moins, l’opération est totalement transparente.
Le meilleur des deux mondes, la musique en plus
Après environ 45 km en tout électrique sur un parcours varié comprenant une brève portion de voie rapide (inférieur aux 55 km annoncés mais suffisant en usage quotidien), nous évoluons en mode hybride classique. Les transitions entre les deux sources d’énergie sont fluides, parfaitement gommées, et on retient surtout le lointain feulement caractéristique du 6 en ligne. Très discret et feutré au possible, mais le résultat est flatteur. Parfaitement en accord avec le salon roulant qu’est la Série 5, toujours aussi raffinée et soignée dans sa présentation intérieure. Même constat pour le confort de suspension, bien que calibrée pour compenser l’important surpoids lié aux batteries.
On se prend à hausser le rythme au fil des kilomètres. Tout y invite : la stabilité et la rigueur du châssis, imperturbable et étonnamment agile pour une auto de ce poids et de ce gabarit. Ambiance tapis volant de sport, donc… Qui se confirme en cliquant sur le mode Sport. Incongru, sur un hybride ? Peut-être, mais le résultat impressionne : la poussée est musclée à souhait, à tous les régimes, et sonne à merveille. Zéro brutalité, mais du couple (600 Nm de couple combiné, grâce au soutien de l’électrique), accompagné de ce timbre d’abord grondant, très rond, qui devient rageur à l’approche de la zone rouge. Nous sommes donc rassurés : ce qui fait le sel d’une Série 5 sérieusement motorisée n’a pas disparu.
Notons aussi, signe des temps, que la 545e est uniquement disponible en transmission intégrale xDrive. Aucun reproche à lui adresser en matière d’agrément, le système reste très neutre dans ses réactions et gentiment typé propulsion, en étant un peu plus enthousiaste que d’habitude. Dans la limite de ce qu’autorise une berline de plus de 2 tonnes, qui n’a guère de vocation sportive. Sinon, il existe toujours une M5 CS au catalogue.
Gestion de l’énergie
Outre l’autonomie électrique satisfaisante, la 545e se distingue surtout par la gestion soignée du système hybride en fonctionnement classique, batteries vides. La consommation reste alors tout à fait acceptable compte tenu du niveau de performances : environ 9 l/100 km relevés, sur un parcours alternant relief, voie rapide et réseau secondaire… et en profitant de ses largesses (pour parler pudiquement). Regret, en revanche, pour le volume réduit du réservoir qui grève l’autonomie lors de longs trajets.
Evidemment, comme tout PHEV, l’auto ne présente un intérêt qu’à condition d’avoir recours à la charge le plus souvent possible. Voilà pourquoi les moyennes homologuées de consommation des plug-in n’ont strictement aucun sens (ici, 2,4 l / 100 km), car totalement dépendantes de la proportion de parcours effectués en 100 % électrique. On peut théoriquement consommer 0,0 l en usage quotidien ! L’appétit d’un PHEV doit donc s’envisager sur le long terme, la consommation exprimée en litres aux 100 km n’étant finalement qu’une “photographie instantanée”.
L’argument économique sera de toute manière totalement secondaire. En débutant à 71.850 €, une 545e échappe au malus mais demande 7.000 € de plus qu’une 530d xDrive de 286 ch, fantastique machine à avaler les kilomètres en toute sobriété. Comme toujours, il convient de soigneusement étudier son usage prévu avant de céder aux sirènes vertes d’un hybride plug-in. Le PHEV n’est pas fait pour tout le monde.